Que nous
disent ces photos, retrouvées chez nos ancêtres, où l'on n'identifie pas
toujours qui est qui ? Elles
nous parlent d'un temps que les moins de 20 ans et voire même de 60-70 ans ne
peuvent pas connaître ! Un temps où l'image est précieuse, la photo un
objet rare qui s'encadre, s'affiche, s'offre, se conserve et puis parviendra
jusqu'à nous.
Par
exemple, cette photo prise chez un photographe parisien aux alentours de 1860,
mettant en place trois générations ; la vieille dame assise en bas de la
photo à droite est née avant la Révolution française...
Photos
prises certainement le même jour ; la grand-mère de ma grand-mère et son
père.
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On peut véritablement parler de décor ;
une rambarde, un rideau retombant lourdement tel un rideau de théâtre, une
chaise en arrière-plan, joliment travaillée. L'homme est digne, costume, cravate,
chapeau haut-de-forme, montre à gousset, canne dans la main. Portrait en pied d'un homme de biens
sous le Second Empire.
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Grand classique, la jeune maman et son nouveau-né ;
en l’occurrence, mon arrière-grand-mère et ma grand-mère. Nous sommes au
début du siècle dernier, c'est la première née dans cette famille ; le
père, voyageant beaucoup pour son travail, a bien du mal à laisser sa jeune
épouse et sa petite fille ; ce cliché lui est destiné : il
l'emportera dans ses déplacements, dans une poche intérieure de sa veste, sur
son coeur...
Les photos d'enfants
Charmants minois, douces expressions, pieds et bras dénudés
: l'image idéale du bébé potelé que l'on a envie de tenir dans ses bras,
d'embrasser. La pose est simple : le bébé se tient assis, version
minimaliste sur une chaise, ou version plus artistique sur un tapis de
fourrure.
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Attitudes plus sérieuses
pour ces jeunes enfants bien mis dans leurs beaux vêtements ; images figées
d'enfants sages, vision idéalisée pour des parents que l'on devine en miroir,
aux côtés du photographe. On pourrait même entendre les ultimes recommandations
du père ou de la mère et l’on imagine les tractations pour qu'ils tiennent en
place. C'est long un temps de pose...
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Les fratries
Regroupés de l'aîné au plus jeune, les enfants sont
immortalisés à la demande des parents, figés pour l’éternité dans une période donnée ;
plus tard, la vie en séparera certains qui ne se retrouveront que peu de temps
avant de mourir ; d'autres au contraire ne se quitteront jamais... On
cherche, on scrute la ressemblance, l'air de famille. On habille les aîné(e)s
de la même manière, on leur demande de se rapprocher les uns des autres, de se
donner la main, de faire corps.
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Les communiants
Moment fort dans la vie d'un jeune enfant catholique :
la communion solennelle qui nécessite un passage par le photographe. Poses
recueillies, inspirées même pour certains, le missel à la main, le bras
reposant sur le prie-Dieu, le chapelet autour du poignet : image pieuse
par excellence. L’étape suivante sera la photo de mariage, mais là, pas de
studio, c’est le photographe qui se déplace à l’église.
Les jeunes filles
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Ce sont des photos pleines de promesses ; les corps se
sont étirés, les traits se sont affirmés ; souriante ou pensive, chacune
de ces demoiselles ne regarde pas l’objectif, mais l’avenir !
Les jeunes hommes en militaire
Ils sont beaux, ils sont jeunes, ils sont forts ! Ils
incarnent la fierté d’une nation pour qui ils sont prêts à donner leur
sang ; l’attitude est vaillante, emprunte de romantisme guerrier. Ces
photos témoignent d’une transition dans leur vie : ils deviennent des
hommes ! L’insouciance de leurs jeunes années est désormais bien loin
derrière eux ; ils vont apprendre le maniement des armes, et pour certains
d’entre eux, le commandement des hommes. Et puis il y aura la guerre…
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Les familles
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C’est une
photo que l’on imagine aisément encadrée dans le salon de la maison ; l’air
sérieux de cette famille donne cette impression de gravité qui sied aux
personnes conscientes de leur rang social et de l’importance du moment qu’ils
sont en train de vivre. Ils posent pour la postérité ; l’histoire leur
donnera raison, car la photo est parvenue jusqu’à nous.
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Une mère et ses trois enfants qui posent chez le
photographe. Le père est absent, il est prisonnier en Allemagne… Ce cliché est pris
pour lui et sera glissé dans le prochain colis qui partira, au milieu du tabac,
des gants, des écharpes et des biscuits de soldat. La mère et les enfants font
bonne figure ; ils sont bien habillés pour l’occasion, coiffés avec soin,
maquillés.
La mère et les deux garçons regardent dans une
direction ; une esquisse de sourire aux lèvres. Seule la petite fille
regarde l’objectif. Tous soudés autour de la mère, offrant au père captif une
photo de réconfort, lui montrant que, malgré son absence, ils feront face et que,
par-dessus tout, ils attendent son retour.
Les vieillards
Véritables portraits d’ancêtres vivants. Ces photos
resteront dans les familles, rangées ou exposées, portraits officiels d’une
génération qui a vécu, pour certains, loin des objectifs des appareils photo.
Témoins directs d’une époque où l’image n’est pas encore omniprésente, ils sont
en prise directe avec le passé, la preuve par l’image qu’il y a bien eu une vie
avant nous.
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Article passionnant, faire parler les vieilles photos est un régal. Chaque détail compte, raconte. Les jeunes militaires sont souvent photographiés, cigarette à la main. La plupart du temps elle est factice ;-)
RépondreSupprimerProgressivement,de photo en photo on s'habitue aux visages, on reconnait les fratries sur les photos de mariage...
Bravo pour ce blog, que je suivrai avec plaisir.
A bientôt !