Cornés, jaunis par le temps,
retrouvés dans un tiroir, conservés dans une boîte au fond d'un grenier, les
papiers de famille en disent long aussi bien sur leur époque que sur les
personnes à qui ils ont appartenu.
Papiers administratifs, parfois illustrés de photos, parfois
signés de la main de leur propriétaire, ils touchent au quotidien, marquent
leur appartenance à une société donnée, à une période donnée.
Si on mélange les papiers
officiels avec les papiers administratifs et les papiers intimes (faire-part,
correspondance, carnets d'adresses…), on peut reconstituer la vie d'une
personne, la "géolocaliser" à différents moments de sa vie, connaître
ses relations familiales et amicales, ses goûts, ses intérêts...
Voilà ce qui annonce la naissance, avant de rejoindre la case
prévue à cet effet dans le livret de famille de ses parents qui leur a été
remis au moment de leur mariage.
Puis les lettres de félicitations pour les parents,
les témoignages d'amitié et de réjouissance qui accompagnent la venue au monde
d'un enfant dans un foyer uni et heureux.
Et puis la vie
s'écoule, les enfants grandissent… et, selon les époques, vont à l'école.
Correspondance, dessins et
souvenirs en tous genres se retrouvent chez une jeunesse privilégiée qui reçoit
une bonne éducation, qui voyage et mène une vie agréable en attendant de
rencontrer ˗ ou qu'on lui présente ˗ celui ou celle avec qui il faudra
fonder une famille.
Il y a aussi la convocation au service militaire et, en temps de guerre, l’ordre de mobilisation.
Les papiers officiels accompagnant la remise de médaille pour certains d'entre eux.
Carte postale du front à une
autre époque : les visuels n'ont pas encore envahi leur quotidien ;
peu d'images au début du conflit. Voici le recto-verso d'une carte postale
envoyée par un père aimant à ses enfants.
Les livrets
militaires sont des sources de renseignement précieux, allant même jusqu'à
donner une description physique de son détenteur, ce qui permet de mieux
imaginer la personne.
Plus gai, les mariages !
Faire-part, invitations, publications, félicitations, menus… le tout conservé comme
souvenirs dans de beaux albums photo !
Moins gai, les faire-part de décès ;
mais un vrai trésor pour les généalogistes qui peuvent ainsi tisser les liens
familiaux…
À l'heure de
la dématérialisation des papiers administratifs, maintenant que les e-mails
et les SMS tiennent lieu de correspondance entre personnes, que les
photos ne sortent plus des cartes mémoire et des ordinateurs, et que bientôt
les livres auront disparu, que léguerons-nous à nos descendants ? Une
bibliothèque photo virtuelle ? Un disque dur ou une clé USB comportant le
résumé de notre vie en numérique… ? Nous tiendrons alors à distance les
émotions que suscitent la lecture d'une signature faite à l'encre, un dessin
réalisé par une grand-mère lorsqu'elle était enfant, l'odeur du papier vieilli…
Ne resteront que des données brutes, sans illustration, froides, ne laissant
aucune place à l'imagination, à l'interprétation, à tout ce qui fait le charme
des souvenirs de famille.
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"Fichés ? Photographie et indentification du Second Empire aux années soixante"