Mémoire vive / Côté professionnel

Mémoire vive / Côté professionnel
De la découverte de vos ancêtres à la transmission de vos histoires et souvenirs de famille

mardi 7 novembre 2017

L'exode de Mamène

Samedi dernier, lors de l'assemblée annuelle de l'association Henri Bachelin - association dont je suis membre et dont l'objet est de promouvoir et de faire découvrir ou re-découvrir l'oeuvre de cet écrivain d'origine moravandelle - ma cousine et moi-même avons fait une lecture d'un texte écrit en juillet 1940 par notre arrière-grand-mère commune, Marie, dite Mamène.

Henri Bachelin
crédit photo : le Journal du centre
La lecture venait faire écho aux commentaires d'Henri Bachelin sur l'entrée des allemands à Paris en juin 1940.

Dans ce texte, elle raconte son exode, accompagnée de sa dernière fille et de son fiancé, de l'oncle de ce dernier et d'une amie de la famille, ils ont tenté, depuis Lormes dans la Nièvre, de franchir la Loire pour aller se réfugier en Auvergne, pas très loin de Vichy.

Marie et son époux Pierre début 1900.
crédit photo : Jourda

C'est un récit poignant écrit quelques semaine après que le faits se sont déroulés ; elle relate six journées durant lesquelles, elle et les siens ont vécu dans la crainte, le chaos, l'incertitude engendrée par de fausses nouvelles, des rumeurs en tout genre.

Je connais ce texte depuis plusieurs années ; à chaque fois je me dis que je devrais partager ce témoignage sur mon blog, tant pour sa qualité testimoniale que pour pour ses qualités littéraires intrasèques. Mon arrière grand-mère avait une très jolie plume. Mais à chaque fois, je reculais devant la tâche, ne sachant pas par quel bout m'y prendre.

Dans un premier temps, j'ai retranscrit le texte pour en avoir un exemplaire plus lisible, plus facile à annoter. Et puis, ce premier travail fait, le texte est resté bien au chaud dans la mémoire de mon ordinateur. Je pense que je n'étais pas prête.

Lorsque le président de l'association Bachelin - qui avait eu connaissance de ce texte - m'a demandé si ma cousine - également membre de l'association - et moi même pourrions donner lecture, j'ai non seulement accepté, mais j'ai vu là l'occasion de me ressaisir de ce texte et de mettre mon projet à exécution.

Ma cousine et moi avons fait une première lecture de répétition chez elle. Or c'est elle et sa famille qui habite aujourd'hui la maison de nos ancêtres. Cette première séance, là où il y a 77 ans, notre arrière-grand mère s'est assise, a eu le besoin de consigner par écrit tout ce qu'elle avait traversé, a pris la tournure d'une séance de vspiritisme. Tous les esprits de ces chers disparus étaient au-dessus de la table autour de laquelle nous avions pris place.

Notre lecture à deux voix l'après-midi même devant l'assemblée a été très inspirée, très habitée. L'assistance a été captivée par ce récit haletant et petit à petit a été gagnée par l'émotion.

Forte de cette expèrience, je publierai dans les semaines qui viennent sous forme de feuilleton-illustré et remis en situation, ce récit. A suivre donc...

lundi 11 septembre 2017

Le Havre - septembre 2017

L'occasion était trop belle : joindre l'agréable à l'agréable, combiner généalogie et tourisme, visite du salon GénéHavre 2017 et visite du Havre parée de ses plus beaux atours pour célébrer son 500ème anniversaire, et cerise sur ce gâteau d'anniversaire revenir sur les lieux de villégiature de mon enfance et profiter de l'hospitalité de ma tante, sœur aînée de mon père, merveilleuse "Mémoire vive" de ma famille, témoin privilégié et passeur d'histoire.

crédit : Anne Dardaud


Je débarquais donc de la gare du Havre ce vendredi en début d'après-midi, trainant ma valise à roulette jusqu'au Carré des Docks pas très éloigné. C'est toujours intéressant de rencontrer les différents acteurs de la généalogie en France ; se côtoient les associations actives, les éditeurs de livres et de logiciels, les quelques généalogistes professionnels, les représentants des grands sites Internet de généalogie que nous connaissons tous. L'ambiance est conviviale et chaleureuse. Les contacts se nouent facilement, les discussions passionnées s'engagent.


Il arrive même qu'on rencontre physiquement ceux que l'on ne connait que virtuellement à travers les réseaux sociaux, ce qui donne lieu à des conversations insolites, "ah mais je vous suis ! - Mais moi aussi je vous suis    - C'est donc vous ? "  C'est plutôt amusant...

On fait quelques achats, on complète ainsi sa bibliothèque généalogique, on prend le temps de parcourir les livres qui sont à disposition, et on repart avec des revues, des ouvrages.


crédit photo : Anne Dardaud
Après quelques heures passées dans ces allées, je suis repartie ma valise lestée de ces achats, ce qui n'a pas été inutile pour affronter le "grain" qui m'attendait en sortant ; vent et pluie contre lesquels mon petit parapluie de parisienne ne m'a pas protégé grand-chose. Je suis arrivée trempée et dégoulinante chez ma tante. Et c'est devant une tasse de thé brûlant qu'a commencé la deuxième partie de mon week-end.

Je sais désormais d'expérience qu'il faut parler avec ses proches, qu'il faut accueillir et recueillir leur parole ; ce sont les témoins d'une époque révolue. Elle a connu mon père enfant, mon grand-père disparu longtemps avant ma naissance, elle a connu la guerre, l'occupation allemande, ses oreilles d'enfant ont entendu les fusillades, ses yeux ont vu les parachutages ; sa vie d'enfant aurait pu basculer si au lieu d'un chemin pour se rendre à l'école elle en avait choisi un autre...Tout cela est en elle. Je suis d'ailleurs arrivée avec un petit album que j'ai réalisé avec toutes les photos de nos ancêtres. Les photos sont de bons supports de mémoire ; elles révèlent la parole et permettent d'établir le dialogue. 

crédit photo : Anne Dardaud

Daniel Mendelsohn dans son livre "Les disparus" analyse très bien l'effet que peut produire la présentation des portraits des disparus aux personnes qui les ont connues ; il parle en citant l'Eneide de Virgile, "sunt lacrimae rerum" : il y a des larmes dans ces choses.  Il parle de ce pouvoir des photos de rappeler aux gens à qui ont les montre, la vie et le monde auxquels (en l'occurrence dans le livre) ils ont été arrachés.

De manière moins dramatique, mais avec une réelle charge émotionnelle, ma tante a feuilleté et commenté les photos qu'elle connaissait depuis l'enfance. Ces jeunes personnes, elle les avait connues adultes mais reconnaissait dans les traits juvéniles les personnes qu'elles étaient devenus. J'ai recueilli ainsi des petits morceaux d'informations, des petits bouts de puzzle qui vont m'aider à finaliser ce grand portrait de famille vers lequel je tends depuis des années. A travers elle, tous les ancêtres ont été convoqués autour de la table ; ce sont autant de personnes qu'elle avait aimées et qui l'avaient aimée en retour. A moi d'en saisir l'essentiel et les détails et de restituer sans trahir ces petites histoires familiales qui redonnent chair aux ancêtres trouvés grâce aux recherches généalogiques et qui leur restituent leur humanité.






lundi 4 septembre 2017

Reprise

Ah septembre ! Sa rentrée et son cortège de projets, de nouveautés et de bonnes résolutions qui vont avec, les deuxièmes après celles du mois de janvier que l'on a plus ou moins tenues. Deuxième chance donc pour 2017.

En ce qui me concerne, il s'agit surtout d'une envie de renouer avec l'écriture, le partage et le retour d'expérience. Cette première partie d'année a été particulièrement riche professionnellement : de nouveaux dossiers, de nouvelles rencontres qui m'ont fait voyager notamment dans les archives italiennes à la recherche des ancêtres de ces migrants italiens, venus travailler et pour certains s'installer en France, et pour d'autres partis à bord d'un bateau pour les Etats-Unis, via Ellis Island. 

D'anciens dossiers également ont repris place sur mon bureau ; jamais vraiment terminés, car on en a rarement fini avec la généalogie : il faut alors se replonger dans les histoires familiales, chercher où l'on n'a pas encore cherché et trouver de nouveaux noms, de nouvelles dates, de nouvelles histoires.

Une demande ponctuelle aussi : partir à la recherche d'une descendance en ayant comme seul point de départ le nom de la personne, celui de son époux, le nom et la date de naissance de sa mère, et le nom de son père. Seule indication supplémentaire, son lieu de résidence dans les années soixante. Défi passionnant à relever et grande satisfaction personnelle de parvenir à trouver et reconstituer l'histoire de cette personne. Une impression de sortir ces personnes du néant de l'oubli dans lequel l'absence de descendance formellement établie, et l'absence d'ancrage territorial les avaient plongés.

Enfin, d'un point de vue plus personnel, concernant ma propre généalogie, un coup de fil d'un professeur à la retraite passionné de randonnée et d'histoire localendans le Morvan, a mis en lumière un membre de l'une de mes branches, curé et gendarme sous la révolution et Napoléon ; voilà qui m'a donné envie de partir à la recherche de ce curieux personnage, le rattacher à mon arbre en cherchant nos ancêtres communs et surtout me pencher sur son histoire singulière.

La dernière chose concernant ma propre généalogie et l'histoire de ma famille est une copie du journal d'exode de mon arrière-grand-mère, écrit après coup et retraçant ces journées particulières du mois de juin 1940, où les populations en plein désarroi étaient jetées sur la route. J'avais toujours entendu parler de ce récit, je n'avais que quelques bribes d'anecdotes par les protagonistes de ce drame, à savoir ma grand-mère, sa sœur, mon père (bien qu'âgé de 2 ans).

Mais là, il s'agit de ce que mon arrière-grand-mère a vécu, de ce qu'elle a vu, de quels ont été ses sentiments, le tout de sa belle écriture fine et lisible qui laisse encore transparaitre à travers ses légers tremblements toute l'émotion, la peur et la crainte. Je crois que je suis désormais prête à le partager ce récit , et rendre ainsi hommage à leur incroyable courage.

Ma musette est de nouveau remplie de sujets qui pourront faire l'objet de ce blog ; il est temps désormais de retourner à son clavier, tout en restant curieuse des autres histoires racontées sur les blogs de généalogie (de plus en plus nombreux) et en restant attentive aux histoires trouvées dans les dossiers que l'on me confie.