Elle s'appelle Marie Bonnard et en ce jour d'octobre 1806, elle va devenir l'épouse de Charles Rasse. Les plus émus dans l'histoire ne sont pas forcément les mariés. C'est ce qui ressort de la lecture de cet acte de mariage où finalement il est question d'époux, d'émotion mais aussi d'étourderie...
_______________________________________________________
C'est un acte de mariage plutôt
brouillon, avec des taches d'encre, des ratures et le texte de la page
opposée en surimpression. Le papier du registre a fait office de papier
buvard. Même par le prisme de l'écran de l'ordinateur, on a l'impression
d'avoir de l'encre sur le bout des doigts. Un acte de mariage, parmi
d'autres : on est heureux de l'avoir trouvé, car on sait que l'on va
avoir accès à une foule d'informations, notamment sur la filiation, et
qu'on l'on va pourvoir passer le cap d'une génération supplémentaire.
"L'an mil huit cent six, le quatorze octobre.
Pardevant moi Simon Bonnard, maire de la commune du Plat-Pays, canton de Saulieu, département de la Côte-d'Or et officier public de l'état civil de la dite commune et propriétaire au dit Colonchèvres, âgé de cinquante-trois ans, sont comparus le sieur Charles Rasse, officier de santé, âgé de vingt-quatre ans, fils du sieur Jean Rasse, officier de santé, demeurant à Moux, canton de Montsauche, département de la Nièvre et de dame Françoise Roux, son épouse d'une part ;
Et là , on s'attend à avoir une présentation de la future et bien non ; l'acte se poursuit ainsi :
Lesquels nous ont requis de procéder à la célébration du mariage projeté entre eux et dont les publications ont été faites devant la principale porte de notre maison commune, à savoir le 1er et 28 septembre mil huit cent six et la seconde le cinq octobre de la même année à l'heure de midi, aucune opposition ne nous ayant été signifiée, faisant droit à leur réquisition après avoir donné lecture de toutes les pièces ci-dessus mentionées, de l'acte de naissance du futur époux en date du 13 mars 1783, tiré des registres de la commune de Moux, canton de Montsauche, département de la Nièvre, et celui de la future épouse, en date du 10 août 1782, tiré des registres de la commune de Saulieu, département de la Côte-d'Or et du chapitre VI du titre du code civil intitulé du mariage, avons demandé au futur époux et à la future épouse, s'ils veulent se prendre pour mari et pour femme : chacun d'entre eux ayant répondu séparément et affirmativement, déclarons au nom de la loi que le Sieur Charles Rasse ...
On pourrait penser que l'officier d'état civil s'emmêle quelque peu les feuillets, mais non, tout est relié... La future mariée n'apparait pas encore, on a juste sa date et son lieu de naissance. C'est un début. Mais poursuivons la lecture de l'acte.
...et
demoiselle Marie Bonnard sont unis par le mariage. De quoi nous avons
dressé l'acte en présence de Charles Roux, propriétaire à Bèze, commune
de Moux, agé de quarante-trois, oncle germain du futur époux et du sieur
Antoine Roux, propriétaire à Colonchèvres commune dudit Plat-Pays,
aussi oncle germain, âgé de quarante ans, et du côté de la future
épouse, du sieur Jacques Jean Collinot, notaire impérial, demeurant à
Bèze, commune du dit [...] âgé de soixante ans, oncle maternel de
la future épouse et du sieur Vivant Collinot, propriétaire à Blanot,
âgé de cinquante ans, aussi oncle maternel de la futur épouse, et de
plusieurs autres parents et amis, lesquel après qu'il leur a été donné
lecture l'ont signé avec nous et les parties contractantes présentes et
consentantes.
Et une note renvoie à la première page : on a oublié de nommer la marié.
"et Marie Bonnard, fille majeure de nous le dit Simon Bonnard et Pierrette Collinot, aussi présents et consentants d'autre part"
Ouf,
l'officier finit pas retomber sur ses pieds. Et c'est là qu'on découvre
que la jeune mariée est en fait la fille du maire. Est-ce l'émotion ou
l'étourderie qui sont à l'origine de ces ratures et de ces oublis ?
Comme si le père inconsciemment retenait sa fille, encore un peu avant
de la donner en mariage, de la laisser partir pour créer sa propre
famille. Ce qu'elle fit : Marie est la grand-mère du grand-père de ma
propre grand-mère : sept générations nous séparent.
Superbe découverte :-) Merci pour le partage !
RépondreSupprimerBeau travail de décryptage et j'ai beaucoup aimé l'ambiance de l'histoire! Encore!
RépondreSupprimerC'est le sel de la généalogie ! L'insolite, le décalé, tout ce qui fait qu'un acte qui est sensé être le plus neutre possible laisse transparaitre les sentiments humains ! Tout ce que j'aime ! Merci pour vos commentaires !
RépondreSupprimerah lala merci beaucoup pour ce bel article souriant :)
RépondreSupprimerTrès vivant et laissant transparaître l'émotion qu'à du ressentir ce maire en mariant sa propre fille.
RépondreSupprimer